LES PROBLÈMES D’UNE ZONE FRONTALIÈRE.
Le cas de Chassenon et de Pressignac,
longtemps écartelés entre Angoumois, Poitou et Limousin.


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La situation administrative de Chassenon et de Pressignac, deux communes du Nord-Est du département de la Charente, limitrophes de la Haute-Vienne, ne semble en rien exceptionnelle, et paraît semblable à celles des communes voisines qui furent mises dans notre département par le découpage administratif de 1790.

Or, il n’en est rien, car, tout au long de leur histoire, ces deux bourgades-puis paroisses et communes- de par leur situation géographique, furent au contact de plusieurs peuples, puis à la frontière de différentes circonscriptions administratives, aux limites souvent fluctuantes. Ce qui entraîna de graves problèmes, leur territoire étant convoité par les uns ou les autres, parfois coupé en deux, parfois mis de force dans une circonscription qui n’était pas celle que souhaitaient les habitants.

D’où des tentatives de sécession d’une partie de leur territoire, des situations administratives très compliquées, voire ubuesques, et de nombreuses demandes de rattachement –restées sans suite- au département voisin de la Haute-Vienne, plus particulièrement à l’arrondissement de Rochechouart.
C’est ce que de nombreux documents (lettres et registres des délibérations des conseils municipaux), conservés dans les archives municipales de ces deux communes, nous apprennent.

Dès l’époque romaine, Pressignac et Chassenon se trouvent situés au contact, au point de jonction, de plusieurs peuples : les Lemovices d’Augustoritum (Limoges), les Petrucores de Vesunna (Périgueux), les Pictons de Limonum (Poitiers), et les Santons de Mediolanum Santonum (Saintes), avant que le peuple d’Iculisma (Angoulême) n’acquiert une certaine autonomie.
C’est ce carrefour de peuples, associé à un grand carrefour de routes, qui fera la fortune de l’antique Cassinomagus, du Ier au IIIe siècle de notre ère.

Aux IVe et Ve siècles, sous le Bas-Empire, Chassenon devient le siège d’un « vicus », dépendant du territoire de la cité des Lemovices, mais situé à son extrémité occidentale, toujours au contact des Pictons, des Santons et des Petrucores, qui plus est, à la frontière de l’Aquitaine première et de l’Aquitaine seconde.
L’accession d’Angoulême au rang de cité, au IVe siècle, modifie sans doute encore l’organisation de cette zone de marges qui devient au Ve siècle un lieu d’affrontement entre les Wisigoths qui occupent l’Aquitaine seconde et les Gallo-Romains de l’Aquitaine première, avant que les fils de Clovis ne se partagent la région au VIe siècle : Clodomir contrôlant Poitiers, Clotaire Angoulême et Thierry Limoges. Enfin la création des diocèses mettra les paroisses de Pressignac et de Chassenon dans celui de Limoges, mais à la limite de ceux d’Angoulême et de Périgueux.

L’installation du régime féodal, à partir du Xe siècle, va encore compliquer les choses, car Rochechouart devient le siège d’une vicomté dans la mouvance des comtes du Poitou, alors que les « princes » de Chabanais se placent sous la protection des comtes d’Angoulême. Et, chose étonnante, le territoire de nos deux paroisses va se trouver partagé : les parties ouest de Pressignac et de Chassenon vont se trouver sous la juridiction des seigneurs de Chabanais et d’Angoulême, alors que les parties orientales le seront des seigneurs de Rochechouart et de Poitiers.






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