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Là-dessus, Louis se leva pour fouiner dans un fond d’armoire. Il en
sortit un ouvrage broché passablement défraîchi auquel il paraissait
particulièrement tenir. Sans un mot, il l’ouvrit délicatement et
remettant ses lunettes, s’arrêta sur la reproduction d’une gravure
ancienne. Chacun tendait le cou pour mieux voir. Puis s’adressant au
père de Charlotte :
— Prenez cette loupe et regardez juste au-dessus de la tour…
Malgré le fait qu’il s’agît d’une reproduction, le
trait restait fin et précis : cela ne pouvait être autre chose
qu’une sphère. Une sphère en suspension… Tout en bas, dans un cartouche
central, était inscrite cette légende : « Ruines du chasteau
de Malevent » et une date en chiffres romains : 1608.
Le père reposa la loupe en hochant la tête ;
chacun désirait évidemment en juger par soi-même et au bout de quelques
instants, circulant de main en main, le dessin avait fait le tour de la
table. Le fond montagneux, en arrière-plan de la sphère, ne permettait
pas la moindre confusion avec la lune ou le soleil. Non, il s’agissait
bien d’un phénomène particulier et peut-être habituel à cette époque et
en ce lieu.
— Comme je l’ai brièvement évoqué avant-hier avec
ces deux messieurs, de nombreuses observations similaires ont été
faites dans l’Histoire, et je le suppose, dans diverses parties du
globe. Pour en revenir à ce château, si les faits décrits sont exacts,
et j’ai pu par recoupement le vérifier, nous sommes devant un phénomène
qui dépasse l’entendement. Comprenez-moi bien ! Je pèse mes
mots : devant des connaissances qui ont des milliers d’années
d’avance sur les nôtres. Cette boule lumineuse échappe à toute analyse
rationnelle et sauf le respect que je dois à Monsieur, c’est une
grossière erreur que de tenter de l’étudier. C’est parce qu’elle a
traversé toutes les époques qu’elle est, par essence, intemporelle…
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